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a n a m n e s i s

2018 - 2020


FR  Le 29 décembre 2017, j’ai été victime d'un accident de la route qui m'a immobilisé à l’hôpital durant plusieurs mois. Anamnesis est né d'une série de photos argentiques prises lors de cette longue hospitalisation.

Lorsque j'ai développé les pellicules à ma sortie, j'ai été surprise de constater qu’il me restait peu de souvenirs des instants présents dans les images que j'avais sous les yeux. Ou alors ils me paraissaient très lointains et poussiéreux, inatteignables. Ce qui se dévoilait à moi au travers de ces photographies avait bien eu lieu, pourtant cela ne correspondait pas à ma réalité.

Afin de détacher les photographies de leur valeur indicielle pour y retrouver les souvenirs de cette période brumeuse tels qu'ils existent réellement pour moi, voilés, opaques et mystérieux, les tirages argentiques ont étés manipulés en chambre noire de manière à refléter les absences de ma mémoire, mais aussi le paradoxe face auquel je me retrouve : une envie d'oublier et le besoin de me souvenir.

Aristote employait deux termes pour parler de la mémoire. Il y avait d’une part la mnèmè [μνήμην] pour la mémoire passive, la simple conservation d’un instant perçu du passé, et l’anamnésis [ἀνάμνησις], pour la mémoire active, la recherche du souvenir arraché au passé. Ainsi, la mnèmè est lié à l’esprit tandis que l’anamnesis dérive de l’âme

Anamnesis interroge la mémoire à partir de l’oubli.



EN -  On December 29th, 2017 I was the victim of a severe traffic accident that immobilised me in hospital for a prolonged time. Anamnesis was born from a series of black and white photos taken during this extensive hospitalisation.

When I developed the rolls of film, I discovered images that I had no memory of, or that seemed very distant and dusty, unreachable. What was revealed to me through these photographs had indeed taken place, yet it did not correspond to my perception of reality.

In order to detach the photographs from their indexical value to find the memories of this hazy period as they really exist to me in a veiled, opaque and mysterious cloud, the silver prints have been manipulated in the darkroom so as to reflect the failures of my memory, but also the paradox in which I find myself : a strong desire to forget and, at the same time, the need to remember.

Aristotle used two terms to speak of memory. On one hand there was the ‘mneme’ [μνήμη] for passive memory, that is the simple conservation of a perceived instant of one’s life, and on the other hand there was the ‘anamnesis’ [ἀνάμνησις] for active or reminiscent memory, that is the search for memories extracted from one’s previous lives. Hence, mneme is linked to the mind while anamnesis derives from the soul.

Anamnesis interrogates memory from oblivion.